Café des parents: l’éducation à la pudeur et à l’intimité

Le café des parents du mois de mai a été animé par Mme Zina Hamzaoui, sexologue, sage femme et thérapeute de couple. Vous pouvez retrouver plus d’informations sur les ateliers et consultations de Mme Hamzaoui sur son site internet et dans son livre « Chut, hchouma ! ».

Commençons en force 🙂 L’éducation sexuelle n’est pas une option, c’est une OBLIGATION. Éduquer à la sexualité ce n’est pas initier à la sexualité ! Il faut outiller l’enfant et lui faire confiance car si l’enfant ne trouve pas de réponses à ses questions chez ses parents, il va simplement les chercher ailleurs et là les parents n’ont plus aucun contrôle sur les informations reçues (internet, discussions avec les copains etc). Dans ce domaine, la surprotection peut être une mise en danger et avoir des conséquences dramatiques. Etiqueter ce sujet comme étant sale, tabou, risque de nuire très fortement à l’épanouissement sexuel de votre enfant à l’âge adulte alors que cet épanouissement dans un cadre licite est un besoin que chaque être humain a.

Savez-vous que 90% des enfants âgés de 9 ans ont déjà vu des contenus pornographiques? L’éducation à la sexualité commence dès l’apprentissage de la propreté soit vers 2-3 ans. Il est alors temps d’aborder la notion d’intimité. Il faut apprendre à l’enfant que personne ne doit voir ses parties intimes ET qu’il ne doit les voir chez personne non plus. Il faut lui expliquer quoi faire si quelqu’un lui demande pour voir ses parties intimes (Tu dois CRIER!) et bien insister sur le fait que ça pourrait être quelqu’un que l’on connait. Il faut également lui apprendre qu’il est nécessaire de se laver les mains avant et après s’être touché ses parties intimes. Cette explication doit être répétée très souvent pour être bien intégrée. Il n’y a aucune connotation sexuelle à cet âge (jusque environ 7 ans) même si des sensations de plaisir peuvent apparaître. Il ne faut pas oublier que pour l’enfant ce n’est qu’un jeu. Dès 2 ans, il est également important de respecter la pudeur de l’enfant.

Vers 5 ans, l’enfant passe par une phase normale dans le développement psychosexuel durant laquelle, il touche et regarde les parties intimes. C’est tout à fait normal et sain. Il faut simplement cadrer. Il faut bien expliquer que cette pratique ne se fait pas en public, que lui seul a le droit de se regarder. Il faut expliquer que c’est une règle chez tout le monde et que certains de ses actes pourraient avoir des conséquences négatives sur lui. Il est important d’insister sur l’hygiène en lui disant qu’il doit se laver les mains avant (surtout pour les petites filles) et après. Il faut également respecter son intimité en frappant à la porte avant de rentrer dans sa chambre ou dans la salle de bain par exemple.

A partir de 6-7 ans, il faut utiliser des termes scientifiques pour nommer les parties intimes. On peut également répondre aux questions en donnant des explications scientifiques, en parlant simplement d’anatomie. A cet âge les frères et sœurs ne doivent plus se laver ensemble. Entre frères ou entre sœurs, on n’expose plus ses parties intimes.

Certains comportements des enfants sont mal vus des adultes car ils y mettent une connotation sexuelle alors que pour l’enfant c’est juste un jeu, une expérience. Il faut faire attention à ne pas le culpabiliser. Si l’enfant a un comportement du type « se toucher » ponctuellement, il faut fermer les yeux dessus et simplement lui dire de se laver les mains. Si par contre le comportement est régulier, il faut creuser. D’abord il faut vérifier son hygiène de vie: son alimentation, la fréquence des activités sportives, le sommeil, le niveau de stress etc. S’il a une hygiène de vie correcte, il faut consulter des spécialistes.

Il est important de valoriser nos enfants, qu’ils n’aillent pas chercher ailleurs ce qu’ils n’ont pas chez nous. Lui dire qu’il/elle est beau/belle, que c’est quelqu’un de bien. Un chouette exercice à faire en famille pour développer l’estime de soi et la confiance en soi est de dire ce qu’on aime chez l’autre tour à tour. Par exemple, papa dit de Théo qu’il a énormément d’imagination et est très créatif, Théo dit de maman qu’elle prend trop bien soin de lui, maman dit de papa qu’il est très patient. Un autre jeu consiste à créer une boîte d’estime et tous les jours chacun y met un papier avec écrit dessus une chose qu’il est fier d’avoir fait aujourd’hui et régulièrement en famille on relit les papiers. Une autre idée: on propose à l’enfant de dessiner son super-héros. On lui demande ensuite de décrire les qualités de ce héros et on fait le lien avec l’enfant. Au final, il se rend compte que lui-même est en fait un super héros.

Cas pratiques:

En maternelle, des enfants jouent à se montrer ce qu’ils ont dans le pantalon.
-> Cela fait simplement partie de la découverte et à nous de cadrer. En primaire, cela devient problématique. Que faire ? On réunit les enfants. On explique que ce qui a été fait ne se fait pas. Qu’il faut demander pardon. « Cette histoire restera ici mais on la règle. ». On défend la victime. Elle doit se sentir soutenue et l’autre enfant doit pouvoir présenter ses excuses. 

« Maman, comment on fait des bébés? » Il est opportun de tester les connaissances de l’enfant. « A ton avis, comment fait-on? » Ceci va permettre de savoir quelles connaissances l’enfant a déjà à ce sujet. On peut ensuite donner des explications purement scientifiques.

Une petite fille de 8 ans qui dit qu’elle est amoureuse, comment réagir? En la questionnant. « Qu’est-ce que tu ressens? », reconnaitre que c’est très bien qu’elle soit connectée à ses émotions, « Qu’est-ce que tu apprécies chez l’autre? » Répondre « être amoureux, c’est au mariage » ne va pas aider l’enfant à développer sa confiance en lui, la richesse des émotions et n’aura aucun sens pour lui puisque s’il dit ça, c’est qu’il ressent quelque chose. Ca peut être l’occasion de réfléchir sur ce qu’est l’amour, sur ses différentes formes etc.

Les règles d’or:
1. Toujours répondre à une question posée par l’enfant. Si vous n’avez pas la réponse ou si vous ne savez pas comment la formuler, il faut le lui dire: « Je vais réfléchir à la meilleure façon de te répondre et demain on en rediscute » et bien sûr, le lendemain vous répondez à la question.
2. Ne jamais mentir. Par exemple, dire à un enfant qu’on fait des bébés en se faisant un câlin n’a aucun sens. « Maman, si tu me serres dans tes bras on va avoir un bébé ensemble? »

Petite réflexion:
Certains parents souhaitent préserver leurs enfants et les protéger de la vie sexuelle jusqu’au mariage. Mais quelle image leur donne-t-on du mariage? Est-ce que réellement elle leur donne envie de se marier? L’image que les parents donnent du couple est extrêmement importante. Si dans leur vie de couple, les parents sont épanouis et le montrent, les enfants associeront mariage et épanouissement et il sera alors cohérent pour eux de rechercher cet épanouissement dans ce cadre.

Conseil:
Rappelons également que les enfants doivent être cadrés et surveillés face aux écrans. Il est extrêmement facile de tomber sur du contenu pornographique. Savez-vous, par exemple, que dans le jeu GTA, qui est interdit au moins de 18 ans, une fois un certain niveau atteint, le joueur a le droit d’avoir des rapports sexuels avec la fille de son choix en guise de récompense? Chacun est libre d’analyser cette pratique et ce qu’elle implique.

Faites de la sexualité un sujet comme un autre et permettez à vos enfants de vous poser des questions. Ce sujet doit être abordé en famille élargie, c’est-à-dire qu’il faut également impliquer les grands-parents et autres personnes de la famille proches des enfants. Quand le lien est solide, les enfants n’ont pas besoin de mentir ou cacher et sont à l’aise de partager leurs expériences et ressentis. Expliquez leur les choses simplement avec un vocabulaire adapté en prenant garde de détecter vos croyances d’adulte (connotation sexuelle) et éventuels automatismes acquis durant votre propre enfance 🙂